- Sois tranquille petite Marie, je ne révélerai pas les
secrets de ton journal intime.
Je suis émue en lisant les récits de la fillette que tu étais, au tournant des XIX et XXème siècles.
Je suis émue en lisant les récits de la fillette que tu étais, au tournant des XIX et XXème siècles.
Au mois de mai, j’ai un nouveau #RDVAncestral avec Marie que j’ai
rencontrée à maintes reprises à travers sa correspondance écrite entre 1914-1918.
En 1905, Marie est alors une jeune fille de 15 ans, elle vit à Lyon.
Marie, 9 mai 1905 _ (Les phrases en italique sont écrites dans ces pages) |
- Vous avez trouvé mon journal ? Vous l’avez lu ? s’exclame Marie avec une colère difficilement contenue.
- Rassure-toi, avec le recul d’un
siècle, la plupart des soucis qui t’occupaient sont estompés et paraissent bien
moins graves qu’au regard des adultes qui t’entouraient alors.
- Pour rien au monde je ne voudrais qu’on le lise mon journal. Non pour
rien au monde c’est là que j’ai semé au hasard, mes joies mes chagrins, mes
impressions d’enfant, c’est quelque chose de trop intime ce n’est que pour moi
seule.
- Oui, mais ce journal a été soigneusement
conservé par tes enfants et tes petits enfants dans le tiroir bleu.
- Si je savais qu’on veuille me le
prendre, bien vite je le brûlerais.
- Surtout n’en fait rien, ces cahiers
sont trop précieux pour nous aujourd’hui.
Les 10 cahiers de Marie L. |
- A quoi sert un journal ? pensais-je. A me faire perdre du temps voilà
tout… encore si c’était utile à quelqu’un !
- En te lisant, Marie, j’apprends tant de choses qui me
paraissent insolites. Cela me permet de comprendre le mode de vie de nos
familles ; cent ans plus tard notre vie quotidienne est tellement différente. Je
lis des passages de tes écrits à ma fille qui éclate de rire en découvrant tes
soucis de jeune fille. Ils sont semblables aux siens, mais vos façons de réagir
sont tellement différentes. Par exemple lors que tu prépares ton brevet, l’enjeu
est pour toi bien plus léger que celui d’une adolescente d’aujourd’hui.
- A quoi cela sert-il après tout ce brevet, on n’est pas plus savant
quand on l’a obtenu qu’avant et comme Dieu merci j’espère n’avoir jamais besoin
d’enseigner il n’est pas nécessaire que je me fasse tant de mauvais sang pour
mon brevet, du reste il me semble qu’un échec est une chose de bien minime
importance.
- A notre époque, vois-tu, les jeunes filles mettent
un point d’honneur à réussir avec de meilleurs résultats que les garçons de
leur classe, en effet depuis 1968, les écoles sont mixtes et les filles se
préparent à étudier de nombreuses années pour exercer les professions qui leur
plaisent.
- Elles ne veulent pas se marier
mes arrières petites filles ?
- Elles veulent choisir leur vie
elles-mêmes, sans précipitation. Tu racontes que Madeleine s’est décidée en
deux jours pour accepter d’épouser, deux mois plus tard, le fiancé proposé par
vos parents ?
- J’en ai été étonnée moi-même.
Lorsque ce sera mon tour, je prendrai le temps de réfléchir pour décider si je
suis capable d’aimer mon futur mari.
- Je sais, Marie, que tu seras
heureuse avec André ; l’époux qui va partager ta vie est excellent. (A peine lui
ai-je confié cela que je le regrette, il ne faut pas dévoiler l’avenir ainsi…)
- J’ai toujours aimé tellement les enfants, la famille, j’ai
toujours eu tant besoin d’affection que je ne vois pas d’autre voie pour moi
que celle du mariage.
- Ce serait dommage que tu cesses
d’écrire dans tes cahiers après le mariage. Ou pire, que tu les détruises pour
tourner la page de ta vie de jeune fille.
- Et cependant après avoir
réfléchi mon avis a changé il m’est soudain venu à l’idée que plus tard lorsque
je serais vieille, très vieille, j’aimerai à revoir les souvenirs de ma
jeunesse. Je me suis dit aussi que mon journal m’aiderait peut-être aussi à
devenir meilleure ; en feuilletant mes cahiers je pourrai constater mes
progrès ou mes défaillances, cela m’aidera.
Marie Leclerc a huit ans lorsqu’elle
commence son journal en 1897. Elle est dans sa vingtième année, en 1910, lorsqu’elle ferme le cahier numéro dix. Il est possible qu’un ultime cahier en
cours n’ait pas été conservé, puisque la jeune fille va épouser André le 24 janvier 1911.
Les filles tenaient alors un
journal qu’elles abandonnaient lorsqu’elles se mariaient.
L’écriture est parfaite, très
lisible, il n’y a aucune faute d’orthographe et pas de ratures ni de taches
d’encre. Pas de ligne perdue, les cahiers sont écrits de la première ligne du
premier cahier jusqu'à la dernière ligne du cahier n°10.
L’absence de ponctuation, la
rareté des points et des virgules souvent à contre emploi, apparaissent
déroutantes ; cela restera une caractéristique de l’écriture de Marie, les normes de
l’époque n’étaient pas si rigoureuses.
J’avais prévu de survoler
rapidement ces cahiers d’enfant, mais la lecture s’est avérée captivante, alors j’ai
numérisé l’intégralité pour conserver ce document précieux.
Les billets concernant Marie se retrouvent sous le libellé