2023-05-21

Justine invite ses sœurs

 

« Tous les ans, au mois d’août, c'est-à-dire au commencement des vacances », Justine aimait inviter ses sœurs chez elle dans la campagne mâconnaise.

Son fils Adrien se souvient des réunions familiales qui animaient la vieille maison de Fuissé à la belle saison.

La maison de Fuissé, dessin d'Adrien.


Toute la famille appréciait de leur rendre visite, car Justine mettait un point d’honneur à les accueillir telle une excellente maîtresse de maison. Il paraît même qu’Antoine, lorsqu’il sortait de ses occupations, faisait bonne figure et se montrait patient à l’égard de chacun de leurs beaux-frères.


Lubin Baugin_-Le dessert de gaufrettes

Le soir à la veillée, les femmes bavardaient, les hommes riaient en goûtant le vin. Justine offrait des gaufres mâconnaises qu’elles avaient confectionnées, cuites dans des fers à gaufre, puis roulées en forme de cigare. Mon mari se souvient de sa tante, arrière-petite-fille de Justine, qui enroulait la pate sur un barreau de chaise pour que les gaufres soient exactement à la taille souhaitée.

Cette spécialité du Mâconnais et de Bresse faisait les délices de tous. 

On chantait, Antoine « jouait fort bien de la flûte, de la clarinette et du flageolet. Au besoin même, il pouvait faire danser en raclant du violon. »…

Sans doute, les enfants chahutaient, on imagine le jeune Adrien et sa petite sœur Fanny tout excités dans cette ambiance joyeuse. 

Antoine, Justine et Adrien


Qui composait cette joyeuse assemblée ?



Céleste, la tante aînée, avec les cousins Charles et Camille.

Célestine est devenue veuve après vingt années de bonheur avec Félix. « Mon oncle mourut fort jeune. Le docteur Despiney s’était surmené dans l’exercice de sa profession et succomba à la peine. Il avait publié des observations physiologiques sur les fonctions du larynx et sur la rage » explique Adrien.



La tante Céleste venait accompagnée de sa fille Camille « très belles toutes les deux et très bonnes ». Les voisins et amis du village les appréciaient à leur tour : « L’arrivée de ces deux était toujours le signal de fêtes, de dîners, de bals ».

« Ma tante avait été très jolie, très fine, brune au teint éclatant. On l’appelait dans la famille la poularde de Bresse ».

 


Elle me chagrine un peu cette photographie de Célestine en dame âgée, telle une fleur fanée, sa beauté a disparu avec sa jeunesse. Peut-être aurais-je préféré la garder jeune et resplendissante comme dans le portrait des articles précédents et ne pas la découvrir ainsi dans un vieil album.


 La tante Victoire et l’ogre.

Victoire « était très gaie, très vive et nous l’aimions beaucoup ». Elle avait épousé son cousin doublement issu de germain, puisque issu de mariage de deux frères Buget avec deux sœurs Charlet. Cet extravagant faisait résonner avec brusquerie l’accent du sud-ouest, « disant toutes les folies qui lui passaient par la tête. Il n’admettait pas la contradiction. Sa grosse voix, son formidable appétit, ses grands gestes avaient terrifié la famille. » Il impressionnait ses neveux « grand, gros, très barbu avec de grands bras terminés par de larges mains et des doigts en spatule qu’il tenait écartés en gesticulant. Très myope il avait de gros yeux ronds qui lui sortaient de la tête et vous regardaient de très près en vous parlant comme pour vous avaler ».

« Mon oncle d’un caractère original et d’une brusquerie méridionale apportait bien avec lui quelques orages. Mais la tendre amitié de ma mère pour ses sœurs et la bonhomie parfaite de mon père aplanissaient les petites difficultés dont il était parfois la cause irréfléchie. » 

 

« Sa femme très douce, très fine supportait sans se plaindre toutes les originalités » de ce personnage turbulent. Celui-ci la pleura beaucoup lorsqu’elle mourut et devint alors paisible comme un agneau.


 Fanny, la douce tantine.

Fanny, la « blonde, douce, maladive, sensible à l’excès, pleine de tendresse pour tout le monde » venait avec son mari Eugène Renaud.



Fanny n’a pas eu d’enfant. Elle a donné son prénom à sa nièce Fanny qui hélas mourra à dix-neuf ans. Avec elle, la joie s’éteignit dans la maison.


 La rentrée de septembre.

« À la fin de septembre, tout le monde nous quittait et nous reprenions tristement le chemin de la ville au commencement d’octobre. » La rentrée était programmée tardivement, car la saison des vendanges s’impose comme une période de première importance en Bourgogne. Il s’agit de remplir les caves et de s’assurer d’un revenu confortable.

Ensuite, la famille retrouvait ses quartiers d’hiver dans la maison de ville à Mâcon qui paraissait bien sombre après les joies de l’été. Cependant, Justine et Antoine estimaient nécessaire que leurs enfants s’instruisent à l’école.

 Voir aussi les articles précédents:

Les quatre filles du docteur B. 

Bourgeois de Bourg


2023-04-30

Les quatre filles du docteur B.


Alors que nous nous dirigions vers le centre de Bourg, le carillon sonna, nous avons eu la chance de nous trouver à 11 h 50, juste au bon moment pour l’entendre. À midi, nous sommes entrés dans la co-cathédrale, les nombreux fidèles chantaient un cantique. La lumière pénétrait par les vitraux, illuminant la nef flamboyante. Puis, l’orgue résonna de toute sa puissance pour célébrer ce jour de fête.

Ite missa est, les portes se sont ouvertes. Le flot des paroissiens se déversait lentement, un peu plus brouillon qu’un cortège. Les femmes arboraient leur tenue printanière, comme il se doit le jour de Pâques.

 🔔🔔🔔🔔

Y avait-il autant de monde lors du mariage de chacune des quatre filles du docteur Buget ?

Pierre Buget était un notable. En tant que chirurgien, il exerçait comme médecin en chef de l’Hôtel-Dieu de Bourg. Il avait été diplômé le 8 thermidor de l’an 12 à Paris, pour sa thèse intitulée « Considérations sur la gangrène d’hôpital, et sur les moyens propres à prévenir sa contagion, et à la combattre ».

Hotel-Dieu de Bourg

Il occupait la fonction de membre du conseil municipal, et siégeait aussi au conseil de fabrique de l’église  Notre-Dame. 


La noce de Céleste 

Le 20 août 1823, on se pressait sans doute pour admirer la mariée ravissante au bras de Félix le séduisant futur, tous deux âgés de 21 ans.

Pierre avait choisi pour sa fille aînée un excellent docteur en médecine, poète aussi. Parfaitement assortis, les jeunes gens apparaissaient radieux sur le porche pour saluer les habitants de Bourg.

Co-cathédrale ND de Bourg (Wikipédia)


En 1831, lorsque le père décéda, « sa mort provoqua d’unanimes regrets […] D’une bonté et d’un dévouement à toute épreuve, très homme du monde, très bon cavalier, il avait depuis longtemps de nombreuses sympathies dans la ville. »  

Ses funérailles ont rassemblé tout Bourg dans l’église Notre-Dame. La famille habitait rue Clavargy, près de la place.


Trois filles restaient à marier et cela devait causer du souci pour Adrianne Monnier.


Victor, le seul fils avait alors 25 ans. « C’était un excellent homme, grand, bien fait, très doux, d’une intelligence ordinaire, fonctionnaire modèle ». Sa situation parait assurée en tant que receveur de l’Enregistrement, mais il était affligé d’un bégaiement qui ruina les perspectives de fonder une famille.


La noce de Victoire

En 1835 Victoire accepta l'union avec son cousin, doublement issu de germain puisque leurs grands-parents respectifs étaient deux frères Buget ayant épousé deux sœurs Charlet. Félix Celsis, orphelin très jeune se montrait rebelle, n’ayant pas suffisamment reçu d’éducation aimante et bienveillante. « Doté d’une imagination exubérante et d’une grande activité, il essaya successivement tous les métiers ». Il acheta une étude de notaire qu’il garda peu de temps.   

Sa femme « très douce, très fine supportait sans se plaindre toutes les originalités » de cet homme turbulent. Celui-ci la pleura beaucoup lorsqu’elle mourut ; « il s’est alors souvenu de toutes les vertus de celle dont il a grossi les mérites pour le ciel ».

 

La noce de Justine

En 1838, le 1er janvier

On attendait le fiancé qui ne se pointait pas. Antoine était un célibataire endurci, âgé de 37 ans. Il aurait « oublié l’heure de son mariage et après l’avoir attendu longtemps pour aller à l’église, il fallut l’envoyer chercher. Il fumait tranquillement sa pipe et songeait à je ne sais quoi. » Les accordailles avaient été arrangées par Benjamin Martine, le neveu de Rosalie. Je me doutais que la mère d’Antoine essayait de marier son fils malgré ses réticences. Timide… dit-on ! « La seule vue d’une femme le mettait en fuite ». Pourtant, « on entama des négociations » avec la famille de Justine. Antoine « se résigna à son sort, se laissa présenter, fut agréé, eut beaucoup à souffrir de tous ces préliminaires, mais se trouva en définitive marié sans s’en douter ». 

Antoine et Justine sont des ancêtres de la génération VI, sosas 40 et 41.



La noce de Fanny

En 1842, Fanny, la benjamine donna son cœur à Eugène Renaud, de deux ans plus jeune qu’elle, il avait 28 ans. Cet ancien militaire était devenu percepteur.


💑


Les quatre filles du docteur Buget avaient chacune leur genre de beauté 

Celeste, la grâce féminine.

Justine, la force, l’esprit d’initiative, la résolution.

Victoire, l’esprit et l’enjouement.

Fanny une belle mélancolique, sentimentale et tendre, un clair de lune très blond.

Selon les souvenirs du fils de Justine (sosa 20) auquel j’ai emprunté les descriptions données dans son livre de raison, il nous est possible d’imaginer les quatre mariages et l’enterrement rassemblant famille, amis et curieux.     

Voir aussi ces billets pour connaitre la famille :

Bourgeois de Bourg

Justine invite ses sœurs



2023-04-09

Bourgeois de Bourg

 

Bourg-en-Bresse n’est pas si loin, pourtant il serait temps que j’invite ma famille à découvrir cette cité qui a vu vivre une branche de leurs ancêtres. Certains depuis trois générations (et davantage, je dois approfondir...) étaient des bourgeois de Bourg (prononcez Bourk). Ce titre doit être compris au sens de citoyen de la ville.  

Justine Buget (sosa 41) 
a vu le jour le 26 février 1807, au numéro 2 rue Clavagry à Bourg.

Elle a quitté la maison de ses parents après son mariage en 1838. La date m'étonne, puisqu’il fut célébré le 1er janvier, mais cela ne posait pas de problème il y a deux siècles. 

Elle était entourée de sa mère Adrienne Monnier, de son frère François Victor et de ses sœurs qui signent de leurs jolis prénoms : Céleste, Victoire, Fanny.


En admirant ce portrait de Céleste, je peux imaginer quatre belles demoiselles vêtues d’élégantes tenues.

Célestine

Célestine est l’aînée, jeune et en pleine beauté elle apparait superbe dans sa robe en soie. Elle porte une coiffure très dessinée par une raie en V partageant une épaisse chevelure brillante, une tresse se relève en chignon sur l’arrière et de chaque côté des anglaises couvrent les oreilles. Un sourire doux et malicieux, et de grands yeux sombres qui vous respectent, montrent qu’elle est sûre d’elle. L’originalité de l'impressionnant col festonné dégage un cou élancé, et met en valeur ses belles épaules dénudées. Les manches bouffantes se resserrent sur les avant-bras. Elle a posé ses ciseaux, le dé et son ouvrage pour lire la lettre bien mystérieuse qu’elle tient dans la main gauche. La taille paraît étranglée par une ceinture fermée par une large boucle qui la rend incroyablement mince. Respire Céleste !

Céleste a épousé un docteur que son père médecin a dû lui choisir. Tous deux avaient 21 ans en 1823. Ce portrait pourrait avoir été peint à cette époque-là.

Justine et Fanny, sans doute moins séduisantes, se sont mariées à trente ans. Orphelines de père, étaient-elles moins dotées ?


J’aimerais voir un portrait de Justine à l'époque de ses fiançailles avec Antoine A.  On ne la connaît que sur des photos où elle est plus âgée. Je me demande même si Rosalie Martine, sa belle-mère n’avait pas un lien de parenté avec elle, elle aurait donc pu arranger les fiançailles. Elle est morte trois mois après le mariage. Je dois chercher si l’on peut relier cette branche. Antoine, sept ans de plus qu’elle, ne se montrait certainement pas désagréable, mais trop rêveur. C’est un architecte qui n’a rien construit, il préférait se promener et dessiner dans la campagne. La vie loin de la ville n’apparaissait pas très joyeuse pour Justine. Elle a élevé deux enfants. Hélas en 1859, elle a éprouvé la douleur de perdre sa fille Fanny âgée de dix-neuf ans.


Justine

Ce tableau la montre très digne dans sa robe sombre, boutonnée jusqu’au cou et fermée par un col très sage, la taille corsetée. Elle a conservé sa coiffure avec des anglaises, à la mode de sa jeunesse. Elle ferme les lèvres sans sourire. Même nez droit et fin, ainsi que des yeux bruns, comme ceux de sa sœur, mais les siens paraissent beaucoup plus éteints. Je ne peux pas imaginer Céleste aussi sévère et triste.

 

En 1838, lorsque Justine s’est mariée, son père Pierre Buget médecin, officier de santé était mort depuis sept ans.

 



Elle n’a connu aucun de ses aieuls.


Du côté paternel :

Claude Buget est né à Châtillon-la-Palud dans la Dombes. En 1763, il avait 24 ans, il exerçait comme chirurgien major dans deux hôpitaux de la ville. Son mariage avec Marie Joseph Charlet est célébré à Bourg, le onze janvier, en même temps que celui de son frère qui épouse la sœur de sa femme. Toutes deux sont les filles de Gaspard Charlet, un marchand connu à Bourg, puisqu'il avait la fonction de major de milice bourgeoise.


Du côté maternel :

Louis Monnier est né à Pont-de Veyle en Val de Saône, lieutenant de la maréchaussée puis inspecteur de gendarmerie. Il était lui-même fils de Jean Joseph Monnier, un docteur en médecine qui vivait à Bourg avec sa famille.

Il a épousé Louise Vorle en 1773. Son beau-père Pierre Vorle était contrôleur des actes des notaires.



Pour l’heure, je ne prospecte pas plus en amont sur les habitants de Bourg. Je dois aller me promener dans la ville. Plus tard, je vous raconterai les exploits militaires des oncles de Justine.

 

Voir aussi :

Les quatre filles du docteur B.

Justine invite ses sœurs


 

2023-03-04

Un négociant en toiles

 

Lorsque je passe dans la rue Grenette, je m’arrête devant son magasin, et je prends le temps de réveiller Pierre Chartron, (sosa 88), négociant en toiles à Lyon.




Sur cette StoryMap, j'ai retracé les lieux où il a habité (1795-1874).


Pierre Chartron est le petit-fils d'un maître fabriquant en étoffes de soye, son père était apprêteur de gazes à Lyon, avant d’aller s’installer à Villemoirieu où Pierre est né en 1795. Je m’interroge sur ce lieu inattendu où il a vécu durant quelques années. Il se pourrait qu’il ait souhaité s’éloigner de Lyon, préférant se retirer comme agriculteur en Isère, plutôt que de rester pris dans la tourmente révolutionnaire. Sa belle-famille a souffert de la Terreur. Son beau-père Gaspard Margaron a été guillotiné, ses beaux-frères ont émigré en Suisse. François Lupin, celui qui est resté à Lyon a été fusillé. 

Pierre est l’aîné; lorsque son père déclare la naissance de sa petite sœur Marguerite Élisabeth en 1792, il est connu comme agent municipal à Villemoirieu. Il était agriculteur trois ans auparavant.

Pierre va étudier le droit à Grenoble. Il travaille ensuite à Lyon, il s’est rapproché de ses oncles et tantes : deux frères qui ont épousé deux sœurs. En se mariant avec sa cousine, il resserre encore le réseau familial rempli d'implexes et de mariages intrafamiliaux unissant les Margaron et les Chartron.



En 1819, Pierre a 24 ans, leurs noces qui viennent d’être célébrées le 8 mai le rendent heureux. Marie Jacques, il préfère l’appeler Jacqueline ou plus tendrement Zélie (source recensement 1838). Il va bien s’entendre avec cette cousine. À dix-huit ans, elle est devenue une belle jeune femme. C’est à elle qu’il pense, alors qu’il descend d’un pas allègre depuis les pentes de la Croix-Rousse vers la Presqu’île.

Actuellement rue René Leynaud _  Wikipédia


Ils habitent dans l’immeuble de son beau-père et oncle, au numéro 33 rue de la Vieille-Monnaie dans le quartier de Croix-Pâquet. Il se rend au magasin de tissus du n°6 rue Basse-Grenette, celui qui porte l’enseigne de la maison Laporte, Falque et Chartron.

 


Il s’est associé avec ces négociants qui font fabriquer leurs commandes par les ouvriers que l’on n’appelle pas encore les canuts.


Spécialisés dans la rouennerie, en gros et demi gros, ils vendent des toiles de laine ou de coton imprimées. Leur magasin regorge de couleurs : rose, violet, rouge  dont les dessins ou les reliefs résultent de la disposition des fils teints avant le tissage; ces tons chaleureux dominent sur les étoffes rayées ou à carreaux selon la mode de Rouen. Ils proposent aussi un joli choix d’indiennes qui plaisent à la clientèle…


Mouchoirs de Rouen


Ils vendent des mouchoirs. Mais Pierre n’a pas encore de raison de pleurer, les affaires sont prospères et Jacqueline va lui donner sept enfants. L’aînée Marie Anne Pierrette pointe son petit nez l’année qui suit leur mariage, puis voilà André en 1822.

En 1824, avec un petit Jacques de quelques semaines, ils vont habiter au 3e étage au-dessus du magasin.



La famille s’agrandit en accueillant un nouveau-né chaque année : Casimir en 1828, Marie Célestine Pétronille en 1829, Marguerite Clotilde en 1830. Les filles meurent en bas âge, les garçons sont plus solides. L’année 1838 est douloureuse, Marie Élisabeth Philomène nait le 16 janvier, hélas sa mère décède le 10 mars. La nouvelle-née ne survivra pas à ce drame, elle est mise en nourrice à Villeurbanne et s’éteint le dernier jour du mois. Pierre achète pour sa femme une concession dans le nouveau cimetière de Loyasse. Je connais bien cette tombe où repose la famille.  


Pierre va poursuivre de longues années de veuvage, Jacqueline n’a vécu que 37 ans, Pierre a 79 ans lorsqu’il la rejoint.

Il ne s’est pas remarié, il a élevé ses garçons qui sont allés en pension, il leur a conseillé d’étudier le droit comme lui. André et Jacques sont avoués. Casimir, son préféré, travaille avec lui. En 1854, ils s’associent : Laporte et Chartron père et fils.

Son associé, Claude Laporte a sept ans de plus que lui, c’est appréciable de l’avoir comme voisin ; la famille Laporte habite au 2e étage avec deux employées qui sont «demoiselles de magasin». Il est ami avec le curé d’Ars que Pierre doit avoir l’occasion de rencontrer chez lui. N’a-t-il pas donné à sa dernière fille le prénom de Philomène, mis à la mode par celui-ci.

En bon bourgeois lyonnais, Pierre assume diverses responsabilités : trésorier de la fabrique de la paroisse de Saint-Nizier, administrateur de l’hospice de Saint-Alban, de 1842 à 1847 et de 1849 à 1867; il est le président du conseil d’administration du dispensaire général.

17 rue Neuve

Il va vivre jusqu’à l’âge de 79 ans. Il est proche de son fils Casimir, (sosa 44), le seul de ses enfants qu’il n’a pas enterré. Il habite alors au n°17 rue Neuve, avec un valet de chambre et une cuisinière.

Le 29 novembre 1874, Pierre va rejoindre les siens qu’il avait accompagnés au cimetière de Loyasse.

Une cousine prénommée Jacqueline dont Jacqueline est la trisaïeule vient de décéder l’an dernier. Je viens juste de relire une phrase qu’elle m’avait confiée « Qui s’occupera de cette tombe ? »


2023-01-18

Blog anniversaire 8 ans

 

Huit années se sont écoulées depuis 2015, l'année de la naissance de bébé blog dans la forêt de Briqueloup



8
 est un nombre associé à de la prospérité, et si le chiffre se penche, c’est le symbole de l’infini.

Au fil des années, j’ai amassé des découvertes merveilleuses, ce sont mes trésors de généalogie que je mets en récits pour intéresser mes enfants et leur transmettre nos origines. Elles me ravissent ces histoires de paysans, de bourgeois, de marchands, de marins, d’aéronautes,  et même de reines...

Mon blog s’est enrichi de 419 articles.

        38 billets ont été publiés en 2022. 




Mes lecteurs deviennent nombreux et fidèles, ils me soutiennent par leurs commentaires ici, ainsi que sur FB et Twitter. Merci à vous tous !



En 2022, le bilan



Le premier billet « Les yeux gris », inspiré par le généathème du mois de janvier, apparaît malgré sa tristesse, comme celui qui a eu le plus de succès. J'aime créer une histoire, puis m’en imprégner au point de chercher à vivre ce souvenir en marchant sur les lieux où elle se situe. C’est cet épisode qui a guidé mes pas cet été, dans les bois de mon grand-père. 

 


Mes yeux se sont aussi remplis de larmes lorsque je me suis intéressée à Antoine, un autre grand-père de mon époux, l’aviateur qui s’est envolé vers l’infini en 1917. Je n’avais pas encore réussi à écrire sur cette branche savoyarde. Pour mieux les connaître, cinq textes forment une série consacrée à Antoine et à Marie, ces jeunes mariés amoureux dont la vie passa comme un éclair. 

Antoine, un As de l’aviation

Marie, jeune épouse dans son nouveau foyer

S’envoler  

Détruire les lettres 

Un télégramme redouté 

Voler


Le thème du vol en avion et en montgolfière a porté une bonne partie de mes billets, certains au plus près de la réalité, d’autres avec l’imagination à partir de documents.

En 1784, avec tous nos ancêtres lyonnais, nous avons levé les yeux « Dans le ciel de Lyon », le 19 janvier ; puis encore le 4 juin, pour admirer « Une Lyonnaise dans les airs ». Je viens de reprendre l’article Wikipédia Élisabeth Tible sur lequel je travaille, et, surprise ! j’ai découvert qu’une compositrice a créé un opéra en 2022. Je vous invite à relire mon billet pour en écouter un extrait.



Bien sûr, cela m’a donné envie de voler à mon tour. Ayant trouvé une lettre qui a atterri dans la boîte d’archives confiée par un cousin, j’ai osé imaginer qu’elle m’était destinée, alors je me suis rendue à « L’invitation » dans le château d’Espérance, à bord d’une montgolfière de rêve.




Pour le ChallengeAZ 2022 j’avais choisi depuis longtemps le thème de l’épistolaire inspiré par les archives que l’on m’a confiées.

Puisqu'elle nous invitait, je suis allée rendre visite à la très chère tante Zélia à travers sa correspondance. Je lui ai consacré neuf billets. J’aurais encore d’autres occasions de partager avec vous les récits de sa vie à Paris au XIXe siècle, des événements de son époque, ou de ses voyages. J’ai partagé des lettres qui m’ont émue, intéressée, amusée ou intriguée. 

 

Mes projets pour 2023 :

Inscrire un mariage dans ma généalogie, puisque mon fils vient de se fiancer.

Cependant, reconstituer un arbre anglo-américain avec des origines germaniques et finnoises risque d’être un défi impossible à tenter. 





Je vous souhaite à tous une Bonne Année 2023.



Voyez comme mon blog grandit au fil des années :

Bloganniversaire 2 ans

Bloganniversaire 3 ans

Bloganniversaire 4 ans

Bloganniversaire 5 ans

Bloganniversaire 6 ans

         Bloganniversaire 7 ans

2022-12-17

Un prénom à l’envers


Le généathème de ce mois a pour sujet l’océrisation. Il s’agit du traitement d’une image par un logiciel de reconnaissance de caractères, ainsi le logiciel[1] déchiffre les formes et les traduit en lettres. À partir de là, il va être possible de faire des recherches plein texte.

Dans les journaux numérisés, puis océrisés, j’ai pu trouver le patronyme de mes ancêtres, ce qui occasionne une cascade de surprises. Tout en écrivant ce billet, les découvertes se sont enchaînées.

 


Un Rendez-vous Ancestral avec un professionnel de la typographie pourrait m’aider à éclaircir un mystère.

 


Je vais donc me rendre à Marseille pendant l’été 1917.

J’entre au numéro 24 du boulevard Mérentié, où habite Ferdinand Nicolas, mon arrière-grand-oncle. La porte s’ouvre, sa femme Marie Augustine "Thaïs" Brunet, m’accueille. Elle m’invite à boire un café en attendant son mari.

    Permettez-vous que je vous appelle Thaïs ?

Mon prénom est devenu à la mode récemment. Mon mari m’a emmenée à l’opéra, j’ai adoré la soprano. Les représentations de Thaïs ont fait scandale en 1900, mais maintenant c’est un succès. Est-ce que vous aimez l'opéra comme Rose, la fiancée de Marius ?

Thaïs est heureuse de bavarder avec moi, sa voix à l’accent chantant de Provence me plait. 

Je la laisse parler et je n’ose pas lui demander pourquoi elle est nommée Anaïs dans la publication de son mariage en 1889[2].

                                 

J'aimerais qu'elle me dise si elle s'entendait bien avec sa belle-sœur, mon arrière-grand-mère, car c'est elle l'objet de ma visite.

 - - Nous étions voisines en 1889, elle demeurait au numéro 9 de la rue Escoffier, nous habitions au 29 boulevard Chave. Ma mère tenait alors une épicerie dans le quartier du Camas. On la voyait, accompagnée ses deux petits garçons Marius, sept ans, et Joseph, cinq ans.

    - Marius est mon grand-père ! Avez-vous connu son père ?

  - Bruno, le capitaine … Mon beau-frère m’impressionnait beaucoup. Il était très sévère. Il est mort trois ans après notre mariage. La vie n’était pas facile pour sa femme, devenue veuve elle avait besoin de travailler, elle est devenue épicière[3]  comme ma mère.

   - Est-ce que c’est elle qui vous a présenté Ferdinand ?

  - Je le trouvais bien vieux, j’avais 26 ans et lui 42 ans. Mais il était instruit et avait une bonne situation de lithographe, donc ma mère m’a poussé à le rencontrer pour voir s’il me convenait.

 

Ah ! voilà Ferdinand qui arrive. Il revient d'une réunion au cercle, il s’occupe de politique avec les Républicains socialistes[4].

Son mari se déplace lentement, le dos courbé, il paraît triste et usé ce vieil homme de 70 ans.  

Je lui présente mes condoléances pour le décès de sa sœur aînée.

- Je suis désolée de n’avoir pu me rendre à l’enterrement de mon aïeule, car je n’ai pas été prévenue à temps. Je sors de mon sac un petit papier[5].


  - La mère de mon grand-père s’appelle bien Marie ? Que s’est-il passé à l’imprimerie du Petit Marseillais ? Le typographe a mélangé toutes les lettres :

M A R I E

    I R M A

Ferdinand sourit de voir ma réaction. 

 - Il aurait pu faire attention, c’est n’importe quoi ! Ou alors c’est l’océrisation qui ne reconnaît plus les lettres.

Il répond tranquillement :

  - Mais non, le typographe n’a pas fait d’erreur ! C’est mon métier et je t’assure que l’on doit être sérieux, surtout dans un avis de décès. Tu peux faire confiance.

   - Elle se faisait appeler Irma ? Je l’ai vue signer Marie !

  - Dans notre famille Nicolas, cinq des sept filles ont reçu ce prénom. 

   - C’est à n’y rien comprendre ! J’ai vu Marie Thérèse Catherine dénommée Virginie sur son faire part de décès[6], Marie "Joséphine" Zoé devenir Marie Joséphine Julie[7], puis Marie[8]. 


au clic pour mieux voir les prénoms des Marie !


     - Mes sœurs se faisaient appeler sous d’autres prénoms.

Et mes deux frères s’appellent Marius. C’est à eux que notre neveu doit son prénom. Je me souviens du jour où j'ai accompagné Bruno pour  déclarer la naissance de ton grand-père.

 

Thaïs est allé chercher une photo de Marius (sosa 12) qu’elle me montre. Il porte le brassard de deuil. Heureusement, il a pu se trouver auprès de sa mère lors des derniers moments. Il était en convalescence, rapatrié après une blessure dans les Dardanelles…

 Thaïs repart et vient déposer sur la table une carte postale envoyée de Salonique.

 


     -  Nous avons reçu des nouvelles de Marius, il est retourné sur le Front d’Orient après les funérailles de sa mère. Il a écrit de Salonique le 29 août. Son frère Joseph s’y trouve aussi.

    - La guerre ne se terminera donc jamais ? déplore Ferdinand qui paraît très fatigué.

 

J’aurais encore d’autres questions, mais je dois prendre congé. Le soleil m’éblouit lorsque je sors dans la rue du Camas, je suis un peu sonnée. J’éprouve le besoin de marcher dans ce quartier qui est aussi celui de Rose que Marius va épouser après la guerre.

Je suis tellement surprise d’apprendre que Marie était connue sous le prénom d’Irma. "Marie" Augustine Rose, première-née de la famille, qui porte les prénoms de sa mère Rose et de son grand-père maternel Auguste.

Moi qui croyais la connaître un peu …

J’aurais dû demander à son frère de me parler plus longuement de sa famille, mais sa femme m’a fait signe qu’il était fatigué. Aurais-je le temps de le revoir ? Il va mourir avant la fin de l’année 1917[9].


Les billets qui mettent en scène mon arrière-grand-mère :

Une lettre que j'aurais aimé recevoir : M- Marie

Elle habite à Marseille en 1880, rue Kleber

ensuite  rue Hoche à Marseille


[1] C’est l’occasion de découvrir que mon logiciel PDF24 creator est capable de reconnaître le texte d’une image. Je me sers beaucoup de cet outil et je vais utiliser cette possibilité.   https://tools.pdf24.org/fr/creer-pdf

[2] Le Petit Provençal, 13/5/1889.

[3] Indicateur Marseillais.

[4] Le Petit Provençal, 6/7/1914, élections. 

[5] Le Petit Marseillais, 25/12/1914.

[6] Le Petit Marseillais, 30/04/1917.

[7] Le Petit Provençal,15/09/1890

[8] Le Petit Marseillais, 25/02/1914

[9] Le Petit Marseillais, 9/11/1917.