2023-05-21

Justine invite ses sœurs

 

« Tous les ans, au mois d’août, c'est-à-dire au commencement des vacances », Justine aimait inviter ses sœurs chez elle dans la campagne mâconnaise.

Son fils Adrien se souvient des réunions familiales qui animaient la vieille maison de Fuissé à la belle saison.

La maison de Fuissé, dessin d'Adrien.

Toute la famille appréciait de leur rendre visite, car Justine mettait un point d’honneur à les accueillir telle une excellente maîtresse de maison. Il paraît même qu’Antoine, lequel ne s'était pas montré enthousiaste pour épouser Justine, cependant quelques années plus tard, lorsqu’il sortait de ses occupations, faisait bonne figure et se montrait patient à l’égard de chacun de leurs beaux-frères.


Lubin Baugin_-Le dessert de gaufrettes

Le soir à la veillée, les femmes bavardaient, les hommes riaient en goûtant le vin. Justine offrait des gaufres mâconnaises qu’elles avaient confectionnées, cuites dans des fers à gaufre, puis roulées en forme de cigare. Mon mari se souvient de sa tante, arrière-petite-fille de Justine, qui enroulait la pate sur un barreau de chaise pour que les gaufres soient exactement à la taille souhaitée.

Cette spécialité du Mâconnais et de Bresse faisait les délices de tous. 

On chantait, Antoine « jouait fort bien de la flûte, de la clarinette et du flageolet. Au besoin même, il pouvait faire danser en raclant du violon. »…

Sans doute, les enfants chahutaient, on imagine le jeune Adrien et sa petite sœur Fanny tout excités dans cette ambiance joyeuse. 

Antoine, Justine et Adrien


Qui composait cette joyeuse assemblée ?



Céleste, la tante aînée, avec les cousins Charles et Camille.

Célestine est devenue veuve après vingt années de bonheur avec Félix. « Mon oncle mourut fort jeune. Le docteur Despiney s’était surmené dans l’exercice de sa profession et succomba à la peine. Il avait publié des observations physiologiques sur les fonctions du larynx et sur la rage » explique Adrien.



La tante Céleste venait accompagnée de sa fille Camille « très belles toutes les deux et très bonnes ». Les voisins et amis du village les appréciaient à leur tour : « L’arrivée de ces deux était toujours le signal de fêtes, de dîners, de bals ».

« Ma tante avait été très jolie, très fine, brune au teint éclatant. On l’appelait dans la famille la poularde de Bresse ».

 


Elle me chagrine un peu cette photographie de Célestine en dame âgée, telle une fleur fanée, sa beauté a disparu avec sa jeunesse. Peut-être aurais-je préféré la garder jeune et resplendissante comme dans le portrait des articles précédents et ne pas la découvrir ainsi dans un vieil album.


 La tante Victoire et l’ogre.

Victoire « était très gaie, très vive et nous l’aimions beaucoup ». Elle avait épousé son cousin doublement issu de germain, puisque issu de mariage de deux frères Buget avec deux sœurs Charlet. Cet extravagant faisait résonner avec brusquerie l’accent du sud-ouest, « disant toutes les folies qui lui passaient par la tête. Il n’admettait pas la contradiction. Sa grosse voix, son formidable appétit, ses grands gestes avaient terrifié la famille. » Il impressionnait ses neveux « grand, gros, très barbu avec de grands bras terminés par de larges mains et des doigts en spatule qu’il tenait écartés en gesticulant. Très myope il avait de gros yeux ronds qui lui sortaient de la tête et vous regardaient de très près en vous parlant comme pour vous avaler ».

« Mon oncle d’un caractère original et d’une brusquerie méridionale apportait bien avec lui quelques orages. Mais la tendre amitié de ma mère pour ses sœurs et la bonhomie parfaite de mon père aplanissaient les petites difficultés dont il était parfois la cause irréfléchie. » 

 

« Sa femme très douce, très fine supportait sans se plaindre toutes les originalités » de ce personnage turbulent. Celui-ci la pleura beaucoup lorsqu’elle mourut et devint alors paisible comme un agneau.


 Fanny, la douce tantine.

Fanny, la « blonde, douce, maladive, sensible à l’excès, pleine de tendresse pour tout le monde » venait avec son mari Eugène Renaud.


Fanny n’a pas eu d’enfant. Elle a donné son prénom à sa nièce Fanny qui hélas mourra à dix-neuf ans. Avec elle, la joie s’éteignit dans la maison.


 La rentrée de septembre.

« À la fin de septembre, tout le monde nous quittait et nous reprenions tristement le chemin de la ville au commencement d’octobre. » La rentrée était programmée tardivement, car la saison des vendanges s’impose comme une période de première importance en Bourgogne. Il s’agit de remplir les caves et de s’assurer d’un revenu confortable.

Ensuite, la famille retrouvait ses quartiers d’hiver dans la maison de ville à Mâcon qui paraissait bien sombre après les joies de l’été. Cependant, Justine et Antoine estimaient nécessaire que leurs enfants s’instruisent à l’école.

 Voir aussi les articles précédents:

Les quatre filles du docteur B. 

Bourgeois de Bourg