2020-09-22

Un voisin original

 Que pensaient les habitants de Saint-Julien de cet artiste qui vivait ici, de 1889 à 1901, avec sa femme et ses enfants ?

Paul Blanc, peintre et graveur, originaire du village voisin, se montrait assurément original. Il s’intéressait aux mendiants pour les dessiner. Ils arrivaient dans sa maison où il leur offrait à manger. Il les habillait de guenilles qu’il avait achetées lors de ses voyages en Italie et il faisait poser ces pauvres chemineaux pour les croquer au crayon et ensuite graver leurs portraits.

 .

La demeure de Pierre et d’Éléonore (sosa 52 et 53) qui est encore ma maison, est proche de celle de l’artiste.

Ce dessin de Paul Blanc pourrait presque avoir pour cadre leur intérieur.

Paul Blanc, intérieur Provençal


Pierre Angelvin est boulanger, il a dû maintes fois offrir un morceau de pain aux vagabonds attirés par la réputation de Paul Blanc.

Paul Blanc, Ayez pitié

Éléonore plaignait souvent Rosalie, la femme de Paul, qui devait subir les inconvénients et même les parasites que les voyageurs apportaient dans sa maison. Écoutez ce que confiait Paul, toujours bienveillant envers les mendicanti :

« Ce n’est pas pour le leur reprocher, mais du 1er janvier au 31 décembre, ma jeune famille et moi sommes littéralement dévorés par la vermine. Sitôt que nous sommes débarrassés de celle du dernier modèle qui vient de nous quitter qu’un autre plus intéressant nous arrive, avec sa surcharge de petites bêtes qui, en quelques heures, ont vite fait de nous envahir tous. »

La maison de Paul

Bien que sa présence soit attestée dans le recensement, je n’ai pas réussi à situer précisément la maison de Paul Blanc, elle a peut-être été démolie. Étroite, comme beaucoup dans les villages perchés en Provence, elle comportait une pièce par étage :

« Au rez-de-chaussée, la cuisine basse et enfumée : on montait à l’étage supérieur par des marches branlantes en se tenant à une corde poisseuse ; la pièce principale était son atelier. »

Paul Blanc, mendiant Provençal

Le vagabond

Paul Blanc raconte avoir déniché certain jour un petit vieux Bourguignon des plus bizarres, dont chaque mouvement était un tableau :

“Je l’ai gardé plusieurs semaines. Je n’ai jamais vu de modèle plus intéressant. Il circulait librement dans les rues du village, affublé de costumes fantastiques que j’avais rapportés d’Italie. Je n’ai jamais rencontré d’être plus indépendant. J’en ai tiré un très bon parti comme modèle. Il m’a quitté, à mon grand regret, heureux comme un Dieu, me promettant de revenir… Tiendra-t-il sa promesse ? En peu de temps, il s’est engraissé, sa figure était remplie et cela lui a fait perdre son caractère.”

La chanson

« Deux trimardeurs ont passé la nuit chez moi. L’un est le bossu physiquement faible et délicat, à l’âme identique ; l’autre a une jambe coupée au raz du bassin, mais il demeure intrépide et plein de santé, un vrai indépendant. » « Et c’est ainsi que tous deux reflètent l’image vivante de leur chanson : 

Gai comme un gueux, le pas traînant,

Narguant les gens qui me repoussent,   

Insouciant, je vis content,

Je m’en vais où le vent me pousse.

Je trouve mon sort sans pareil

Quand j’ai du pain et du soleil.» 


Il n’est pas sûr que les villageois appréciaient ces passagers miséreux. Bien qu’il jouisse d’une réputation de la part de ses amis peintres ou critiques d’art, l’artiste n’a guère vendu de gravures lors des expositions à Marseille ou à Paris. Ceux-ci lui conseillaient de changer de sujet, mais Paul Blanc était passionné par ses mendicati.

La série des articles sur Paul Blanc et sa famille :

Un voisin original

Un curieux baptême en 1895

Rosalie Mothère est-elle la mère ?

Bibliographie

Jean Marzet, Paul Blanc et ses mendicanti : d’après des documents recueillis par Eugène Hoffmann et les fils de l’artiste, Paris, Valère Blanc, 1959, 180 p.

J’ai créé l’article Paul Blanc (peintre graveur) sur Wikipédia, ma source étant principalement ce livre. 

Pour mieux connaitre mes AGP :
 Pierre Angelvin (sosa 52) qui a participé à l'Insurrection de 1851

Éléonore Fave (sosa 53)Le jupon d'Éléonore

5 commentaires:

  1. Bonne idée que s'intéresser aux voisins de ses ancêtres, et Paul est un personnage fort curieux

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  2. Aux Archives départementales, sur la listes des Républicains arrêtés et jugés par la Commission mixte des Basses-Alpes, votre ancêtre Pierre Angelvin ne figure pas.Peut-être a-t-il eu la chance d'échapper à la répression qui a suivi le coup d'État de Louis Napoléon Bonaparte?...Le seul Angevin qui y figure, de Valensole, a 47 ans.FÉLICITATIONS POUR TOUTES VOS RECHERCHES PARTAGÉES.

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    1. Merci de votre intérêt pour cette histoire.
      Comme je l’indique avec plus de détails, dans l’article (cité en lien) : « Insurrection en 1851 », Pierre Théodore a été emprisonné à Aix, puis gracié et sa femme a touché une pension en réparation en dédommagement.

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  3. Vernon BLAKE 1875 1930 auquel je m interesse à écrit un très bel article sur Paul BLANC

    The store of a MASTER ETCHER

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    1. Je n'ai trouvé aucun lien pour approfondir cette information. C'est dommage, j'aurais volontiers ajouté cette source sur l'article Wikipédia.

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