2025-11-08

H_Herboriser


Parmi les botanistes lyonnais, Pierre Antoine Barou du Soleil est connu pour sa découverte d’une orchidée rare : l’orchis papilionacea. L’orchis papillon est une plante protégée.

Orchis papilionacea


Il herborisait notamment autour de son domaine du Soleil à Beynost, en Bresse.

Formé par Marc Antoine Claret de la Tourette, Barou est l’ami intime et le fidèle compagnon de ses sorties botaniques. 

La Tourette écrit dans ses « Démonstrations élémentaires de botanique » :

« Notre ami M. Barou du Soleil, Amateur éclairé, a le premier découvert dans notre province cette espèce ; il la trouva en 1788, dans un petit pré, situé près de la grande route de Montluel, à une lieue et demie de Lyon. »

 

La Tourrette avait eu comme lui une charge de conseiller à la Cour des monnaies. Au bout de vingt ans, il avait renoncé à ses fonctions pour se consacrer à sa passion. Il organise le jardin botanique de la nouvelle école vétérinaire avec son ami l’abbé Rozier. Je peux imaginer P.A Barou en train d’admirer tant de plantes alpines ou étrangères qui poussaient là. Il était invité dans le jardin d’acclimatation que La Tourrette cultivait chez lui, montée des Chazeaux à Lyon et d’autres encore dans le jardin botanique dans son domaine de la Tourrette à Eveux.

Le voyage en Italie

De novembre 1768 à mai 1769, Barou et La Tourrette voyagent en Italie et jusqu’en Sicile. Ce Grand Tour constitue un long voyage de formation pour le jeune homme sous la direction de son maître. Il lui fait découvrir la culture, pratiquer l’italien en rencontrant des érudits, et cela permet d’enrichir le cabinet de curiosité et les collections des deux naturalistes.

Dans la lettre qu’il envoie, le 17 décembre 1769, à Claret de la Tourrette au retour de cette expédition en Italie, Jean Jacques Rousseau lui reproche de ne s’être pas suffisamment consacré à la botanique.

« Quand j’appris votre voyage, je craignis, Monsieur, que les autres parties de l’histoire naturelle ne fissent quelque tort à la botanique, et que vous ne rapportassiez de ce pays-là plus de raretés pour votre cabinet, que de plantes pour votre herbier. Je présume au ton de votre lettre, que je ne me suis pas beaucoup trompé. »

 

Rousseau, etc.

Marc Antoine Claret de la Tourrette herborise avec J.J. Rousseau qu’il rencontre lors de ses séjours à Lyon ; c’est un ami qui fréquente le salon littéraire de sa mère. Voltaire est un ami de son père. Celui-ci possède une bibliothèque réputée pour être une des plus belles de Lyon. On voit que les relations de cette famille apparaissent fabuleuses pour le jeune Barou.  

De retour d’une expédition dans La Grande Chartreuse, Rousseau dit : « Vous trouverez dans notre guide et chef, monsieur de la Tourrette, un botaniste aussi savant qu’aimable, qui vous ferait aimer les sciences qu’il cultive ». (cité dans Les Années Rousseau, le patrimoine du XVIIIe siècle en Rhône-Alpes EMCC 2012)

La Tourrette participe au projet de la nomenclature linnéenne pour renommer les espèces connues. Il correspond avec les principaux botanistes de son époque, Carl von Linné, Albrecht von Haller, et les Lyonnais : Jean Emmanuel Gilibert, Bernard de Jussieu

Barou a rencontré, ou très souvent entendu parler de tous ces personnages que fréquente La Tourrette. Nul doute que, comme Rousseau, il a partagé leur goût pour le développement de la culture scientifique et littéraire du siècle des Lumières.

J.E. Gilibert était proche d’eux ; il a une pensée amicale et triste pour Barou dans son Histoire des plantes d’Europe :

«L’Orchis papilionacea, plante réputée italienne, trouvée au-delà de la Pape par notre malheureux ami Barou du Soleil.»

https://archive.org/details/histoiredesplan00giligoog/page/n18/mode/2up?q=Barou

 

Les herbiers


Admirez quelques planches de l’herbier de Marc Antoine Claret qui rassemble plus de mille spécimens, il est conservé au Parc de la Tête d’Or. 

Pierre Antoine Barou avait constitué 146 cahiers intitulés Herbiers de la France qui hélas semblent perdus après avoir été saisis et confiés aux membres du comité de l’Égalité le 24 fructidor de l’ère républicaine. Il n’a pas eu le temps d’ajouter à sa collection deux liasses de papier contenant des herbes desséchées qui ont dû être jetées par ceux qui sont entrés dans sa maison après son arrestation.


Barou aurait aussi découvert plusieurs plantes aquatiques, peu fréquentes dans les étangs de Dombes telle la pilularia globulifera.

Pilularia globulifera


L’herboriste Benoit Vaivolet dit à propos de l’orchis :

« Je devais le reconnaître en allant voir mon très cher ami Barou que je regretterai toujours ! » source https://www.persee.fr/doc/linly_1160-6436_1887_num_14_1_4837

 

Une passion partagée

Dans la correspondance avec Jeanne Marie, le couple échange des nouvelles sur les cueillettes de plantes.

Il est touchant de voir combien cette passion devient communicative.

Sa femme s’adonne elle aussi à la botanique, elle met à profit ses séjours dans leur domaine de Châtillon d'Azergues pour initier sa nièce Marie Antoinette Durand de Châtillon. Dans cette lettre, il lui adresse ses félicitations lorsqu’elle herborise, même en son absence.  

31 juillet 1782

« Tu as bien fait, ma bonne amie d’aller passer quelques jours à Bayères. Tu vas t’occuper sans doute de botanique et j’espère qu’à mon retour tu pourras m’en donner des leçons. Mademoiselle de Châtillon surtout doit y avoir fait de grands progrès, présente-lui l’hommage de mon admiration pour ses connaissances, en lui faisant agréer mes tendres compliments. »

 

Je ne suis pas sûre que les herbiers de Barou du Soleil aient été conservés. Je vais essayer de me renseigner auprès du jardin botanique de la ville de Lyon.


 

4 commentaires:

  1. Qu'il est beau cet herbier, et quel travail ça a du être ! Merci pour la découverte de cette belle histoire.

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  2. Hélène Fréret8 novembre 2025 à 12:19

    Magnifique article qui me donne envie d'accompagner Pierre Antoine dans ses observations. De retour chez moi, je chercherai son orchidée dans mes flores.

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  3. Quel joli billet ! J'aime chercher du regard les orchidées sur les causses, lorsque vient le printemps.

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