J’arrivais juste à cette heure entre chien et loup qui est celle que je préfère.
Je revenais d’une grande journée aux archives de Draguignan. Mes recherches avaient été fructueuses, j’avais pris une grande quantité de photos, je n’avais pas déchiffré tous les actes des registres des notaires, seulement les premières lignes lorsque j’avais pu repérer des patronymes de mes forêts d’ancêtres. Aussi, tout au long du trajet de retour ma tête bourdonnait de tant de projets d’histoires à écrire sur mon blog. J’étais impatiente de rentrer et d’explorer ma récolte de photos.
Ce matin, j’avais laissé mon chat
pour seul habitant de notre grande maison, personne ne devait rentrer avant la
fin de la semaine et j’appréciais d’avoir du temps à consacrer à ma généalogie.
Je vivais à mon rythme depuis quelques jours et j’avoue que j’avais un peu
perdu la notion du calendrier. Donc je pouvais espérer une soirée tranquille
plongée dans le XVIIIème siècle de mes ancêtres.
L’auberge était éclairée, j'aurais dû en être étonnée. Je garai la voiture devant l’écurie. Je rentrai, chargée de
mes sacs contenant téléphone, ordinateur et appareil photo et je poussai la
lourde porte d’entrée.
Une jeune femme, de l’âge de mes
filles, assise près de la cheminée, semblait tenir sur ses genoux un bébé emmailloté. Je
la reconnus, c’était Magdelaine Allier avec qui j’ai vécu par la pensée ces
derniers mois.
Lorsque je m’approchai c’est un
chat qui bondit hors des genoux de Magdelaine.
Mon chat ! Pacha vint à ma rencontre. D’un miaulement, il me reprocha de m’être absentée depuis le matin. J’ai un chat doué de parole.
Mon chat ! Pacha vint à ma rencontre. D’un miaulement, il me reprocha de m’être absentée depuis le matin. J’ai un chat doué de parole.
-Bonsoir, comme tu as tardé.
Entre vite le souper est prêt.
Mon aïeule m’attendait et je
n’étais même pas surprise de l’étrangeté de la situation. Elle fut
bienveillante. J’étais fatiguée, les yeux me piquaient de tant d’heures à lire
les vieilles liasses ou peut-être d’une émotion qui remontait du fond des temps.
Je venais de si loin, j’avais traversé 250 ans. Elle m’accueillit sans me poser
de questions.
Cette soupe aux herbes du jardin
qui mijotait dans le chaudron me rappelait celle de ma grand-mère.
Mon hôtesse dressa un couvert pour moi, elle avait sorti sa soupière, ses plus vieilles cuillères, des ustensiles usés que je connaissais mais que nous avions oubliés à la cave.
Mon hôtesse dressa un couvert pour moi, elle avait sorti sa soupière, ses plus vieilles cuillères, des ustensiles usés que je connaissais mais que nous avions oubliés à la cave.
Nous dinâmes ensemble, mon chat,
installé tout près d’elle, semblait l’avoir adoptée.
-Je n’aurais jamais pensé avoir
une petite-fille telle que toi. Je vois que tu as beaucoup plus d’imagination
que moi.
-Ah, Mère-grand, tu as fait
preuve de nombreuses qualités.
-Ma petite, j’ai pu voir que tu racontes ma
vie à ta façon. Parfois tu te laisses emporter par ton imagination.
-Chère Magdelaine, tu as laissé
plusieurs traces conservées aux archives et je te connais bien.
-Je sais tout ce que tu dis sur
moi. D’un côté cela me plait bien que tu t’intéresses autant à la généalogie de
nos familles. Je te félicite pour toutes ces pages que tu écris.
-Mais tu ne sais pas lire mère-grand. Comment as-tu vu mon blog ?
-C’est ton chat, avec ses pattes
douces et adroites, il a joué avec la souris, il a allumé ta petite table.
-Ma tablette ! Mon chat aime
se tenir à côté de moi lorsque j’écris. Il participe à sa façon.
-Il m’a lu tes histoires.
-Oui Pacha est un chat qui parle
à qui sait l’entendre.
-Cela me touche que tu
t’intéresses à ma vie. Tu as bien fait d’aller jusqu’à Grambois et de montrer combien
notre maison s’est transformée.
Tu as assez bien raconté cette
terrible année 1766, j’avais 25 ans et tant de soucis après la mort de Jean.
Mais tu as pris la liberté d’affirmer que Marguerite était venue exprès pour
m’aider. En fait ce n’était pas si compliqué pour ma sœur, elle habitait à
Saint-Julien.
-Ah bon ! Elle vivait à Saint-Julien ?
Si j’avais découvert cela …
-Tu aurais pu être plus
perspicace. J’ai regardé ton arbre généalogique, tu connaissais le nom de son
mari, cela aurait pu t’expliquer bien des choses. Tu aurais compris que c’est
par son entremise que Jean m’a demandée en mariage. Mon père était heureux de
donner sa fille à un aubergiste, c’est encore ce qu’il a fait pour notre
petite sœur Marie.
Observe de plus près ton arbre de
notre famille sur cette page.
-Effectivement, j’ai noté un
premier mariage avec un dénommé Jean Gallardon (ou Gaillardon)
-Tu peux le relier, tu connais sa
famille ! Cherche son histoire tu dois avoir plein de documents.
-Je n’ai pas encore tout exploité
tu sais.
-Ma petite, ce soir je suis venue
chez toi pour te demander d’être au plus près de la réalité de notre famille.
Tu dois rectifier toutes les approximations qu’avec le regard de ton époque tu
te permets d’imaginer.
La conversation avec Magdelaine
s’est poursuivie en buvant une tisane de thym jusqu’au moment où nous tombâmes de sommeil, l'une et l'autre.
Le chat dormait depuis longtemps sur ses genoux, il n’est jamais aussi câlin avec nous. Il se passait une relation étrange entre elle et lui.
Je le soupçonne d’avoir servi d’intercesseur pour cette rencontre fantastique ...
Le chat dormait depuis longtemps sur ses genoux, il n’est jamais aussi câlin avec nous. Il se passait une relation étrange entre elle et lui.
Je le soupçonne d’avoir servi d’intercesseur pour cette rencontre fantastique ...
Le lendemain, mon premier geste
fut d’ouvrir le dossier des photos numérisées la veille. Je trouvais la preuve du mariage de la sœur de Magdelaine et plusieurs pistes à explorer.
Allié quittance hoirs Gaillardon |
J’aimerais vraiment revoir
Magdelaine.
Bravo pour ce billet et ce #RDVAncestral très réussi. Au plaisir de te lire à nouveau dans les prochaines semaines !
RépondreSupprimerGuillaume
Superbe récit !
RépondreSupprimerToujours un plaisir de te lire. Ce récit est très original. A bientôt !
RépondreSupprimerBravo pour cet article ! Pour moi, qui ne sais guère faire parler mes ancêtres, je trouve ce procédé très réussi. Il y a quelque chose du fantastique de "La Morte amoureuse", qui me revient à l'esprit... Puisse ton chat continuer à te transmettre les paroles de tes ancêtres !
RépondreSupprimer(Tu l'auras compris... j'adore les chats, les fantômes et les ancêtres... Alors, pour moi, c'est parfait !)
Merci pour vos commentaires élogieux qui me touchent.
RépondreSupprimerJ’ai essayé d’écrire un récit fantastique et j’ai mis mon chat à l’honneur puisqu’il m’a bien aidée en servant de passeur avec mon ancêtre. C’est fou, à mesure que j’écris sur ce blog, les fantômes reviennent habiter les lieux où je les cherche.
Un très bel article, qui m'a beaucoup touché. Je te félicite, continue surtout d'écrire comme tu le fais si bien.
RépondreSupprimerAvec mes amitiés,
Thomas de Sacrés Ancêtres!
Comme un conte cette soirée particulière....
RépondreSupprimerCoup de patte et plume légère