En ce jour de décembre 1917, il
fait très froid, Marie marche d’un bon pas dans les rues grises de Lyon.
Pour ce RDVAncestral, je la retrouve
à nouveau (nous étions ensemble au #RDVAncestral Place Bellecour en novembre), telle
une amie proche puisqu’elle m’a déjà raconté sa vie quotidienne à travers sa correspondance.
La jeune femme veut choisir les
cadeaux qu’elle offrira aux enfants pour leurs étrennes. André passera ce Noël triste
auprès des blessés dans son ambulance. Il a chargé son épouse de s’occuper des
cadeaux pour ses filleuls.
L’an dernier, elle avait offert « une
boîte de soldats avec voiture d’ambulance » à son neveu qui en a beaucoup
joué.
La
jeune tante n’hésite pas en entrant dans la librairie, elle sait déjà que Maurice (qui deviendra un homme fort
important plus tard) va recevoir le best-seller de 1917. Elle commande « L’enfance
de Bécassine un livre que tout le monde veut cette année pour les enfants tant
il est amusant paraît-il »
Pour Jacqueline qui va avoir onze
ans, le choix est plus délicat, Marie a pensé lui envoyer « un très joli album de
cartes postales. » La petite et ses quatre sœurs aînées sont orphelines depuis le mois d’août,
Pierre était capitaine d’infanterie. André, attentif à ses nièces, va aider la
femme de son frère.
Marie essuie une larme en me confiant que dans sa
famille les fêtes ne seront pas réjouissantes. William, père de quatre enfants,
a été tué le mois dernier et Madeleine, la sœur de Marie reste dans un chagrin
immense, tous essayent d’éviter de parler de ce qui pourrait la faire pleurer.
Depuis l’an dernier, Marie déplore la tristesse ambiante à Lyon :
« Les magasins à peine
éclairés où les montres somptueuses du temps jadis ont été interdites vous
rappellent vite à la réalité. [L'an passé, pour la messe de minuit] Les églises n’étaient que peu éclairées […] vous
rappelaient tristement le temps où nous vivons. On devient très sévère pour les
économies du point de vue de l’éclairage »
Je demande à Marie ce qu’elle va offrir
à son petit Jean.
Elle pourrait agrandir la collection des petits
soldats de plomb qu’André avait envoyé à son fils, le petit était si fier de
recevoir ces soldats miniatures pour jouer à la guerre « comme son papa ».
Prudente, la jeune maman a su veiller à ce qu’il ne les jette pas à la tête de sa
petite sœur. Lorsque Jean s’excitait dans une bataille, elle le distrayait en
lui montrant des livres d’image représentant des soldats.
Il y a deux ans, elle avait acheté
un ravissant cadeau, fabriqué par des mains adroites, qui a enchanté son petit
garçon :
« Une tente de toile grise
achetée à la vente de Fanny Chartron, dans cette petite tente, il y a un blessé
sur un très drôle de petit brancard en bois, une dame infirmière et un général
sur le seuil le tout minuscule et très bien fait, le général est superbe avec
sa profusion de médailles. »
Marie aime se rendre aux ventes
de bienfaisance, c’est certainement une obligation sociale, il faut s’y montrer
et dénicher des bricoles à acheter, on trouve des objets qui feront des cadeaux
économiques doublés d’une bonne action. C’est aussi une occasion de rencontrer
la famille et les connaissances qui œuvrent dans ces associations lyonnaises.
poupées coll. J Sylvestre BM Lyon |
Marie me propose de l’accompagner
à la vente de Fanny. Je serais ravie de rencontrer cette arrière-grand-tante
fantasque dont j’ai entendu quelques anecdotes racontées par Jacqueline sa
petite fille. (Mais ceci est une autre histoire)
Je n'ose pas souhaiter un « Joyeux Noël » à Marie, pourtant je sais qu’il y a du bonheur dans sa vie malgré les années difficiles de la Grande Guerre.
Je n'ose pas souhaiter un « Joyeux Noël » à Marie, pourtant je sais qu’il y a du bonheur dans sa vie malgré les années difficiles de la Grande Guerre.