Dans l’Hôtel de Ville de Lyon, le
9 mars 1655 après-midi, le gouvernement
municipal se réunit à l’occasion de la délibération consulaire.
Entrons dans la chambre du Consulat d’hiver pour assister à la délibération consulaire.
« Messieurs les consuls, l’invitation
pressante de procéder sans retard à la décoration de la Grande salle de l’Hôtel
de Ville faite aux échevins, par le Maréchal de Villeroy et l’archevêque Camille
de Neufville son frère, est mise à l’ordre du jour.
Vous savez que le gouverneur et l’archevêque
lieutenant qui régissent la cité de Lyon désirent un bâtiment à la hauteur de la renommée de notre ville.
Ils souhaitent que la rénovation de la voûte commence sans plus tarder. »
Parmi les édiles, la discussion est
animée, car beaucoup préféreraient différer ces travaux dans un souci
d’économie. « Vu l’estat où se trouvent à présent réduite
la communauté laquelle est surchargée de tant d’aultres dépenses…» rappellent raisonnablement certains.
« Les finances du consulat sont
en déficit depuis longtemps, et la construction du nouvel Hôtel de Ville a coûté
des sommes considérables.»
Néanmoins, la plupart se félicitent de
pouvoir disposer d’un palais communal aussi prestigieux. « Il orne la
ville ; par ses dimensions et son architecture, il la met au premier rang
des cités du royaume ».
La Grande Salle des Fêtes, éclairée
par cinq fenêtres, au premier étage donnant sur la place des Terreaux, est longue
de 82 pieds (26 m) et large de 38 pieds
(12 m 50). Elle est destinée à recevoir les plus grands princes de France et de
l’étranger lors de leurs visites à Lyon. Les Lyonnais tiennent à les recevoir
avec faste pour montrer la puissance de
leur ville.
« C’est l’honneur de la ville qui
est en jeu » s’accordent les échevins.»
Il leur suffit de passer dans la
grande salle, voisine de la salle du Consulat, pour faire un constat
désolant : «La voûte apparaît bien laide au dessus des sculptures et
des tapisseries «nue et même taschée en divers endroits ainsy
qu’on la voit aujourd’huy ». On
observe qu’« elle ne correspondoit pas à la magnificence du reste de la
salle». On convient qu’«elle desplait aux yeux qui ne peuvent souffrir un si grand défaut dans
un lieu si magnifique».
Registres des délibérations municipales, AML, BB210 |
Le choix s’impose d’engager rapidement
« les mains les plus savantes qui
se pourroient trouver ».
Finalement, le programme iconographique plait à tous :
Au centre, le temple d’Auguste, allégorie du souverain, entouré par les signes du zodiaque, sont autant d’images du gouvernement politique et du commerce.
Registres des délibérations municipales, AML, BB210 |
Le sieur Panthot, peintre de la ville
de Lyon, ne peut assumer cet ouvrage. On suppose que c’est son ami Charles Le Brun
qui lui a recommandé Thomas Blanchet comme particulièrement
capable d’entreprendre la décoration de l’Hôtel de Ville. Cet artiste arrive de Rome où il fréquentait les plus grands peintres
et sculpteurs maîtres du baroque.
Les consuls ayant considéré toutes ces choses et mesme jugé
que « ladite peinture proposée estoit d’une extrême bienséance pour rendre
cette grande salle entièrement accomplie. »
Modello de la voûte de la Grande salle, par Thomas Blanchet, MBA, Lyon |
Finalement, le programme iconographique plait à tous :
Au centre, le temple d’Auguste, allégorie du souverain, entouré par les signes du zodiaque, sont autant d’images du gouvernement politique et du commerce.
D’après le contrat, passé le même jour
chez le notaire, le prix fait est fixé 12 000 livres et 30 pistoles.
Messieurs
les prévosts des marchands et eschevins précisent les conditions du contrat, signé
par Germain Panthot et Thomas Blanchet
venu recentement d’Italie. Ils recommandent ainsi d'utiliser
« Toute la peinture à l’huille qu’il conviendra faire en la voulte, laquelle estant une fois
sèche, ilz en mettront une seconde. »
De s’entourer de « bons et excellents ouvriers agréés par le Consulat. »
« Comme encore sont tenus d’employer les plus belles et vives
couleurs qui se pourront trouver et de rehaulcer avec de l’or de ducat en feuille,
sans aucune épargne nuisible à la beauté de l’œuvre. »
Ce jour signe le début d'une longue carrière lyonnaise de Thomas Blanchet.
Pour voir son parcours, voici la série des billets sur Thomas Blanchet :
Ce jour signe le début d'une longue carrière lyonnaise de Thomas Blanchet.
Pour voir son parcours, voici la série des billets sur Thomas Blanchet :
Sources
Archives de Lyon, Délibérations
municipales, registres des actes consulaires BB 210, folio 106 à 109
Galactéros Lucie, Thomas Blanchet, Ed Arthena, 1991
Les décors de l’Hôtel de Ville de Lyon au XVIIe siècle, in
L’Hôtel de Ville de Lyon, éd. Imprimerie Nationale, 1996