Le fils du héros, Karla Suarez
El Hijo del héroe,
traduit de l’espagnol (Cuba) par François Gaudry, éd. Métailié, 2017, 259 p.
traduit de l’espagnol (Cuba) par François Gaudry, éd. Métailié, 2017, 259 p.
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Le père du héros de ce roman
est-il un héros ?
Aucun doute, il faisait partie
des troupes cubaines, il est mort en Angola ce qui lui confère un statut digne
des honneurs de la nation cubaine.
Ernesto avait douze ans lorsqu’il
devient « le fils du héros », il prend alors sur lui le poids de ce
deuil, et sa vie parait triste, taciturne, raisonnable et studieuse.
Au fil de ses rencontres
amoureuses, le jeune homme devient un grand lecteur.
La construction de ce roman est
brillante, chacun des 26 chapitres porte le titre d’un livre important pour Ernesto.
Ce qui donne envie au lecteur d’explorer ces livres ; depuis La forêt obscure jusqu’au Retour aux sources, les récits sont
émaillés de références et de citations discrètes que l’on a envie de ne pas
négliger.
Cependant, le récit d’Ernesto nous ramène inexorablement à sa quête sur la biographie de son père.
Cependant, le récit d’Ernesto nous ramène inexorablement à sa quête sur la biographie de son père.
Renata, sa femme, se montre réticente
envers ce projet qui va finalement causer la ruine de leur couple qui était si
bien assorti. C’est aussi ce que lui dit son ami Berto, un vétéran cubain à qui
il pose tant de questions sur l’Angola.
« Puis il leva les yeux sur
moi, je devrais prendre garde, dit-il, c’était important tout ce travail que je
faisais sur la mémoire, sur le passé, mais il craignait qu’à trop m’obstiner je
perde contact avec le présent. »
Ernesto tient un blog pour écrire
sur cette guerre lors de laquelle Cuba s’est engagé en Angola. Par ce moyen, il
essaye de comprendre pourquoi Cuba a envoyé ses hommes, dont son père, mourir
en Afrique.
Ce superbe récit nous transporte de Cuba
à Lisbonne, en passant par Berlin.
« La mémoire est comme une
grande malle remplie de petites boîtes des souvenirs différents qu’on sort ou
qu’on laisse selon son humeur. Le problème est que parfois, par inadvertance, une
de ces petites boîtes s’ouvre toute seule et devient comme la maudite boîte de
Pandore. Alors il faut s’organiser, saisir les souvenirs au vol, les remettre
dans leur petite boîte, la fermer en forçant et en poser une autre dessus,
pleine de moments agréables, plus forts et plus volumineux. Surtout
ça : quelque chose de fort qui occupe l’espace. »
Ernesto se remémore les réunions
de famille à La Havane entre l’exubérance de ses oncles et la tristesse de sa
mère, les colères de sa sœur et les silences d’Antonio, ami de son père.
Ce père tellement parfait qui n’aurait comme défaut que celui d’être mort.
Ce père tellement parfait qui n’aurait comme défaut que celui d’être mort.
Lisez ce roman, vous comprendrez comment la chute qui
s’esquisse dans le chapitre « Les
intermittences de la mort » se révèle inattendue. Karla Suarez a
réussi un livre passionnant qui nous éclaire sur l’histoire de Cuba vécue par
le héros pendant les années 1970.