Antoine Laplace, l’arrière-grand-père est un As de
l’aviation.
Comme tous les héros, le personnage n’est pas lisse et présente deux faces.
À la fois courageux et lâche. Amoureux et désespéré.
Aventurier et gratte-papier. Cavalier puis aviateur dans l’armée. Il fut un
soldat, victime de la Première Guerre mondiale, un lieutenant pilote, actif lors d’une
époque qui lui a permis de mourir en héros.
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Un as ! |
Lorsqu’il s’est marié le 8 mai 1913 à Chambéry, il était
chef de bureau au Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) à Grenoble.
Mais, n’allons pas installer ce jeune homme séduisant dans l'existence banale
d’un employé de banque, sa vie fut brève mais intense.
Marie lui écrit le 14 mai 1914 : « Comme notre vie va
être courte, ils fuient si vite les jours de bonheur. » Incroyable
pressentiment, pourquoi a-t-elle pensé cela ? Elle venait de donner naissance à
un beau garçon, au printemps le pays était encore en paix. Leur merveilleuse lune
de miel a perdu ses couleurs dans la poussière de la guerre, de la maladie et
du désespoir.
Le petit Paul, est né le 8 mai 1914, exactement un an après
leur mariage, tel un cadeau, deux jours après l'anniversaire des 26 ans du
jeune papa.
Deux ans plus tard, la femme de sa vie allait le quitter
pour rejoindre les bras de la maladie qui devait la livrer à la mort. Amoureux
à jamais inconsolable, il l’a suivi sans se retourner.
Ils ont laissé un fils, si jeune imprégné de tristesse du
destin, relevant la tête, mais marchant péniblement le long de ses parcours
brisés.
L’ombre de la mort ne peut éteindre ce couple, marqué par la
lumière des printemps où l’on se rappelle sa naissance et celle de son fils,
leur mariage et leurs décès. C'est en silence que ses petits-fils fleurissent
leur tombe à Chambéry. Nous dormons dans les draps qu’ils n’ont pas usés, nous
mangeons dans leur vaisselle qu’ils n’ont pas ébréchée, sur d'impeccables nappes brodées (par Marie ?) à leurs initiales juxtaposées.
Le 1er août 1914,
Les hommes sont rappelés à la suite de la mobilisation générale.
Antoine rejoint le 13ème régiment de Chasseurs à cheval. La vie
militaire ne doit pas être un mauvais souvenir. En 1906, à l’âge de 18 ans, il
a devancé l’appel ; cela a dû lui plaire, car il a effectué six années de
service dans la cavalerie. Il sait parler aux chevaux, le 20 mai 1908, il reçoit
des félicitations pour avoir maîtrisé un cheval emporté. Il a aussi l’occasion
de pratiquer l’escrime et il est bon nageur.
Mais cette fois-ci, on ne joue plus, c’est la guerre, alors Antoine,
le cœur serré, doit quitter sa jeune famille. Il rejoint son régiment à
Valence.
Dix jours plus tard, il propose à Marie de venir le retrouver
pour quelques jours à Lyon.
Les lettres qu’ils échangeaient devaient être beaucoup trop
intimes, il n’a pas voulu les conserver. On ne peut qu’imaginer, les
déclarations enflammées, les confidences brûlantes, les souvenirs chaleureux de
ce couple amoureux.
Le 26 septembre 1915, en effectuant une reconnaissance, il
est blessé à la cuisse par un éclat d’obus. Cela lui vaut une citation à
l’ordre de l’armée. Espérons qu’il a passé sa convalescence chez eux à Grenoble
ou plus probablement à Chambéry auprès de leurs familles. Antoine, Marie et le
petit Paul ont partagé si peu de temps tous les trois ensemble, cela doit se
compter en jours pour l’année 1915, trois mois en 1914.
En janvier 1916, de retour sur le front, il est nommé
lieutenant au 13ème chasseurs.
Un valeureux pilote
Antoine est un jeune homme moderne, lorsqu’il apprend qu’il
a l’opportunité de suivre une formation, il se montre intéressé par les progrès
de l’aviation. Il accomplit un stage au sein de l’école militaire d’aviation du
Crotoy. Marie le rejoint pendant trois mois. Elle passe les journées à attendre
son héros, il effectue des trajets de plus en plus longs. Le soir, il lui
raconte ses vols au-dessus de la baie de Somme, au-dessus des ruines des champs
de bataille, au-dessus des villages bombardés, au-dessus des nuages. Puisqu’il
est bien classé, il se présente rapidement à l’examen final. Le 24 août 1916,
son épouse est fière d’assister à la remise du brevet d’aviateur. Mais elle se
montre sûrement inquiète à l’idée qu’il parte combattre sur le front comme
pilote à l’escadrille n° 27.
Marie tousse. Marie ne guérit pas des suites de la pleurésie
dont elle souffre depuis l’an passé ; plus légère qu’une plume, elle ne réussit
pas à reprendre des forces. Elle voudrait Antoine auprès d’elle. Antoine obtient
quelques jours de permission, pour la voir si faible qu’il en est désespéré.
Entre le 10 mars et le 26 avril 1917, les lettres, adressées
à Antoine par Marie, et par sa sœur Fanny lorsqu’elle est trop fatiguée,
donnent à suivre le déclin de Marie.
Elle s’éteint le 26 avril 1917.
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Souvenirs de Marie, ses cheveux dans le médaillon |
Le 5 mai, le jeune homme éploré écrit : «Mes Biens chers
Parents :
… Toujours de plus en plus désespéré. Je n’ai de goût
à rien, je suis désorienté je ne puis m’habituer à mon affreux malheur. Je sens
bien que si le Bon Dieu n’a pas pitié de moi en nous réunissant, il n’y a plus
une minute de joie ici-bas. […]
Un nouveau deuil vent de frapper encore notre pauvre
escadrille. J’arrivais sur le terrain pour voir un de mes camarades se tuer.
C’est un lieutenant marié. Si je pouvais être à sa place, moi qui n’est [sic]
plus rien. »
Il dit encore : « Prenez bien soin de mon
pauvre Petit, apprenez lui à prier pour sa chère Petite Maman. […] »
Son anniversaire est le lendemain, il a 29 ans, et son fils Paul
va avoir trois ans dans trois jours.
Il prend des risques de plus en plus importants. Il "a exécuté des croisières de chasse poussées loin dans les lignes ennemies, rentrant à plusieurs reprises avec un avion atteint par les projectiles."
Le 16 juin 1917, "au cours d'un combat qu'il avait engagé avec son énergie accoutumée", son avion est atteint par des tirs ennemis. Il
réussit à se poser, il descend et se couche sous l’appareil pour mourir.
D’autres billets sont en cours d’écriture pour raconter Antoine,
un grand-père séduisant comme l’as de cœur :
Antoine,
un As de l’aviation
Marie, jeune épouse dans son nouveau foyer
S’envoler (Au revoir là-haut)
Détruire les lettres
Un télégramme redouté
De l'autre côté des combats
La mort ou la vie