J'aimerais rencontrer ces misérables galériens condamnés à une peine terrible pour des actes bien pardonnables le plus souvent.
Arsenal des Galères JB de La Rose, 1666, Musée de la Marine Marseille |
Me voici à Marseille dans l’arsenal des galères. Le lieu est impressionnant, c’est ici que l’on construit les vaisseaux du roi, des centaines d’hommes s’affairent à leur tâche. J’entends que l’on parle de Louis XIV, alors je me renseigne sur la date du jour, nous sommes le 29 mai 1679.
Je me rends compte que je ne
verrai pas le pauvre Pierre Taron, l’ami des contrebandiers du sel, qui a été condamné
aux travaux forcés en 1711. Je suis remontée trop loin dans le temps (et
d’ailleurs, ce n’est pas mon aïeul).
Je vais donc aller à la recherche de l’un de mes ancêtres susceptible de se trouver dans ce lieu.
Je vais donc aller à la recherche de l’un de mes ancêtres susceptible de se trouver dans ce lieu.
On me dit qu’il faut voir la plus
belle des galères construites dans l’arsenal. La Réale
est un bâtiment magnifique qui
doit témoigner de la puissance du Roi-Soleil.
La Réale 1679 construction (JB de La Rose) |
Mais moi, je cherche la galère La Reyne où je pourrais rencontrer mon ancêtre André Coudonneau (sosa 582).
On m’indique le chef des maîtres canonniers. François Coudoneau est le frère de mon ancêtre. Il m’accueille en me disant
qu’André serait heureux de me voir, il n’a pas encore d’enfant puisqu'il a épousé
Françoise Boudier dans les derniers jours de l’année 1678.
Aujourd’hui le jeune marié règle
quelques affaires avec le notaire, explique François :
« estant sur le point de son départ pour la présente campagne qu’il va faire avec les galères de sa Majesté sur celle appelée la Reyne commandée par le Sieur DeMontolieu » André est allé faire son testament.
« estant sur le point de son départ pour la présente campagne qu’il va faire avec les galères de sa Majesté sur celle appelée la Reyne commandée par le Sieur DeMontolieu » André est allé faire son testament.
Franchement
je ne suis pas trop fière du métier de ces deux frères : une galère, des
canons… ce n’est pas très sympathique.
« Qu’allez-vous faire dans cette galère ? » demandé-je.
« Qu’allez-vous faire dans cette galère ? » demandé-je.
« Nous sommes une vingtaine
de canonniers et notre rôle est essentiel pour gagner les combats » dit
François. Je comprends alors depuis son poste de maître canonnier c’est lui qui
dirige le service de l’artillerie.
François s’exclame « Voilà
André qui arrive. »
« Eh André ! Sais-tu
que tu as une descendante qui vient nous voir ! » Le regard d’André
me traverse sans y croire. Il se tourne vers son frère. Celui-ci lui
demande :
« Comment s’est passé ton
rendez-vous avec le notaire ? » « As-tu pensé à laisser de
l’argent à notre mère ? »
« Oui j’ai fait à Anne
Marchande un legs de 50 livres payable
incontinent après mon décès. »
« J’espère que je n’ai rien
omis, écoute ce qu’a inscrit le notaire comme c’est bien dit :
Et en outre fait legat icelluy
testateur à Françoize Boudière sa femme pour l’amitié qu’il luy porte des
fruits et usufruits de ses biens et heretage pour en jouir pendant sa vie et
tant qu’il vivra en ce monde et en fere à son plaisir et volonté sans qu’elle
soit tenue de donner caution de beneustendo, à la charge et condition
toutesfois quelle demeure vefve soubs le
nom vidual dud testateur.
Cela c’est pour mon épouse Françoise et mes
enfants à naître. » Il ajoute :
« Et je n’ai pas oublié mon
neveu Lazare pour en faire à son plaisir volonté le tout après
toutefois le décès de [m]a femme. »
« Je te remercie d’avoir pensé à mon fils. Mais vois-tu
puisque ta descendante est là, c’est certain que ta femme te donnera
des enfants. » affirme François.
« Ah ! tant mieux, j’ai même prévu de que l’on prenne la
précaution de calculer que j’en sois le père. » André continue « J’ai
aussi donné 100 livres à notre sœur Catherine. Et 50 livres à Venture Coudounelle
la fille de feu François. »
Je n’ose interrompre les confidences des deux frères. Je ne
comprends pas qu’il y ait un François vivant et un feu François dans la même fratrie
Coudouneau. D’ailleurs je me perds dans les manières d’orthographier leur
patronyme : Coudouneau, Coudoneau, Codoneau, et pour les filles : Coudonel
; Codonel(le) …
Mais ils ne me répondent pas, ils sont trop occupés à organiser
leur départ.
André apparaît excité mais aussi
angoissé à la perspective de ce voyage. Et s’il ne revenait pas ? Quelle
tristesse de penser que sa jeune épouse soit veuve. Ce doit être la première
longue séparation du couple. Il faudrait rechercher quelles batailles navales
furent livrées en Méditerranée à cette époque.
Maintenant, je suis à mon tour
extrêmement inquiète, car je n’ai pas trouvé de traces ultérieures d’André. Il
était mort lorsque sa fille s’est mariée en 1704.
Peut-être n’a-t-il jamais connu
cette enfant qui est notre ancêtre ?