2016-06-11

J_ le Jupon d’Éléonore


Cela m’a bien plu de trouver une aïeule portant de si jolis prénoms; Constance Éléonore est la grand-mère de ma grand-mère. C’est un peu dommage que personne ne sache que notre maison fût sa maison, que l’on ait oublié que quelques-uns de nos meubles et de nos ustensiles étaient les siens.
Avons-nous idée de ce qui va rester de nous ?

J’ai mis bien longtemps à réaliser qu’elles pouvaient être celles d' Eléonore Fave, ces initiales E. F brodées au point de croix avec du fil de coton rouge.


C’était son jupon, ce que je prenais pour une couverture tricotée en coton blanc. Huit mailles à l’endroit, quatre mailles à l’envers, répétées trente fois ce qui constitue un diamètre de 250 cm, sur une longueur de 70 cm. Au bas, un joli motif de quatre mailles alternées sur quatre rangs endroit-envers forme un superbe damier.

Des heures à tricoter. Les aiguilles demeurent peut-être encore dans la boîte à couture.



Lorsqu’Éléonore avait 18 ans, elle vivait avec sa tante Joséphine dans notre maison, selon le recensement de 1851. Elles étaient couturières.
Le 30 avril 1855, Éléonore épousa Pierre Théodore. Ce jupon faisait sans doute partie de son trousseau, lequel sans être détaillé a été évalué à 500 frs dans son contrat de mariage.

Ce jupon lourd, froncé autour de la taille d’une petite femme, gonflant sur les hanches et dans le dos, devait l’habiller avantageusement, la faisant paraître opulente. Peut-être était-elle toute mince ?
L’usage était de porter deux ou trois jupons sous la robe. Le jupon de dessus, appelé « coutihoun », était une jupe qui devait tenir chaud en hiver, il était  confectionné en piqué, matelassé.
Sur la jupe ou la robe, les femmes revêtaient un tablier qui s’adaptait aux circonstances, en toile de coton épaisse pour le travail, en indienne fleurie, en taffetas ou en soie pour les jours de fête.



Éléonore aurait-elle pu penser que la seule pièce de vêtement lui appartenant qui reste dans sa maison 170 ans plus tard soit un jupon de dessous ?


12 commentaires:

  1. Très touchant! et une belle réflexion sur ce que nous laisserons! Merci

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    1. Merci pour ce commentaire. Je découvre votre blog qui me plait beaucoup.
      http://memoires.christinedb.fr/

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  2. Ah, ces objets qui nous parlent...ou pas! Par attachement pour ma grand-mère je conserve quelques objets dont je ne connais pas l'histoire. Je les ai toujours vu chez elle, ils m'ont suivie lors de mes nombreux déménagements mais ils restent muets. Alors, je comprends d'autant mieux votre émotion à avoir su donner vie à ce jupon.
    Merci de nous l'avoir fait partager.

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    1. Comme vous j'aime les objets et je suis surprise des histoires qu'ils peuvent nous révéler. Mais il faut les écouter longtemps avant de les comprendre un peu mieux.

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  3. Belle histoire ! Avez-vous lu "Madeleine Project" de Clara Beaudoux qui découvre dans la cave de son appartement qui n'a pas été vidée les objets laissés par la précédente locataire dont le neveu ne veut pas ? Cela vient de paraître et c'est aussi une belle réflexion sur ce qu'on garde et ce qu'on risque de laisser.

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    1. Je partage votre réflexion.
      J’ai suivi le Madeleine Project sur Twitter et https://storify.com/clarabdx/madeleineproject-saison-2
      C’est une enquête qui me parle car j’ai eu l’occasion d’ explorer la maison d’une marraine qui lui ressemblait. C’est un travail de pro que d’en partager ainsi le déroulé, même s’il est reconstruit et très travaillé. Cela pourrait nous inspirer.

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  4. Votre article est très intéressant et ... vous avez de la chance d'avoir retrouvé ce jupon. Mon ex a jeté les vêtements que nous avions retrouvés. Je n'ai gardé que quelques petits colifichets. Fran

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  5. C'est génial d'avoir pu conserver un objet aussi ancien, en espérant que les générations futures continueront à en prendre soin !

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    1. Mon blog est fait dans ce but, j'essaye de transmettre les histoires des objets.

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  6. J'ai conservé quelques vêtements dont une jupe longue noire en panne de velours de ma grand-mère et une veste noire brodée de perles de mon arrière-grand-mère. Et les deux sont à ma taille ! Je les avais portés ensemble lors d'une fête de quartier où tout le monde était invité à s'habiller en 1900. Ça m'avait beaucoup plu de me glisser ainsi dans leurs tenues.

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  7. J'aime beaucoup votre article, et suis sensible au lien d'intimité tricoté detricoté au travers du comptage des points.
    Et quelle chance d'habiter dans la maison de ses aïeux !

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