Pierre Antoine Barou prend sa plume et son encrier dans son écritoire, il plie en deux une feuille de papier à lettres. Il trempe la plume dans le flacon d’encre noire et la laisse courir au fil de la conversation avec sa femme.
Bavard, il a beaucoup à raconter de sa vie à Paris. Il donne des nouvelles des connaissances qu’il a rencontrées. Il partage ses soucis, il cherche des anecdotes qui lui plairont. Il a du style, sa plume d’oie gratte le papier, alerte, élégante et vive comme un oiseau messager. Pas de rature, sa pensée s’envole légère, il aime ce moment de confidence avec Jeanne Marie. Il lui dit qu’il a du plaisir à écrire. "Je t'écris, ma bonne amie, comme je causois avec toi".
| 18 mai 1785 |
Adieu, ma bonne amie; Je t'écris aussi longuement que si j'y prenois grand plaisir, et Je te jure du fond de mon cœur, que je désire vivement l'instant de te revoir, et de nous occuper en commun de nos affaires et de nos goûts. Mais patience le moment viendra. Farewell.
Arrivé en bas de la troisième page, il ne reste presque plus de place pour l’embrasser.
Thousand kisses
mille et mille baisers
Aucune signature et c'est un peu dommage de constater que personne ne signe dans cette correspondance.
Pas besoin d’enveloppe, la feuille se plie, il va la fermer.
Il prend les instruments pour cacheter le courrier : un sachet de cire rouge en grains. Il allume la mèche d’un petit réchaud en laiton, dans une cuillère, il fait fondre la cire, il aime cette odeur, il la dépose sur le papier et marque l’empreinte du sceau.
Il doit courir à la poste avant que le départ de la voiture de Lyon ou bien il remet la lettre à un voyageur lyonnais de confiance. La lettre arrivera en quatre jours environ.
Jeanne Marie attend le courrier, elle aime recevoir des nouvelles de son mari. Ses lettres lui paraissent toujours agréables, elle les lit et les relit, elle les range soigneusement, par date, par année.
Adieu, ma bonne amie; ménage bien ta santé, reprends des forces, Je conserve les miennes, et si je puis remplir mon objet, nous ne nous occuperons plus qu'à jouir ensemble, des terres, de l'aisance et de gouts qui nous sont communs. Mes plus tendres compliments à tous nos amis. Farewell my dear wife.
Jeanne Marie s’imprègne des tout derniers mots par lesquels Pierre Antoine lui témoigne son affection. Il a des formules merveilleuses :
Adieu, ma bonne et tendre amie, Je t’embrasse de toute mon âme.
| 1785 28 mai |
Je t'embrasse du plus profond de mon cœur.
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